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Interview / Citoyenneté, Groupe Histoire de la Justice Internationale
Le 20 novembre 2017
Saint-Martin-d'Hères - Domaine universitaire
Invitée dans le cadre des conférences du GREJI au sein du M2 Histoire, théorie et pratique des droits de l’homme (HTPDH) vendredi 27 octobre dernier, Me Jacqueline MOUDEINA a évoqué devant les étudiants de la Faculté de droit de Grenoble le procès d’Hissène HABRE, au cours duquel elle a dirigé le collectif des avocats des parties civiles devant les chambres africaines extraordinaires siégeant à Dakar en 2015 (première instance) et en 2017 (appel). L’avocate tchadienne militante des droits de l’homme a retracé les nombreuses étapes du parcours qui a finalement abouti à la condamnation de l’ancien président de la République du Tchad, après 17 années d’un véritable marathon procédural (qualifié par Mgr Desmond TUTU d’« incroyable feuilleton politico-judiciaire »).
Dans ses réponses aux nombreuses questions du public, qui portaient notamment sur la nature des réparations accordées aux victimes ou sur l’absence de poursuites contre Idriss DEBY, Me MOUDEINA a insisté sur le rôle décisif des victimes : « C’est leur procès, c’est leur volonté. Rien ne peut se faire sans elles. » a-t-elle martelé, en soulignant l’importance déterminante de la constitution de partie civile dans la procédure engagée contre Hissène HABRE. Les parties civiles ont ainsi obtenu des réparations dont le montant exceptionnellement élevé a été évalué à l’issue d’un long travail de documentation et de classification (les victimes ayant été classées en trois catégories).
Il a fallu que les victimes de tortures ou de viols dépassent la peur et la honte pour accepter de dénoncer publiquement leurs bourreaux. Me MOUDEINA a expliqué qu’elles ont aussi dû résister au découragement, les autorités tchadiennes et sénégalaises, ainsi que l’OUA ayant multiplié les obstacles et les procédures dilatoires : « Ils ont voulu nous fatiguer, mais nous avons tenu bon, pendant 17 ans ! » Le succès de la démarche des victimes est dû pour une bonne part à l’aide fournie par Human Rights Watch (l’idée de poursuivre Hissène Habré ayant elle-même été inspirée par le procès d’Augusto Pinochet). Me MOUDEINA a souligné la dimension éminemment politique du procès intenté à un ancien chef d’État. Elle a relevé l’incohérence des gouvernements africains, qui sont à l’origine de saisines de la CPI, mais qui dénoncent ensuite le fait que la Cour ne s’intéresse qu’aux crimes commis en Afrique (« Avec les chambres extraordinaires, l’OUA avait la possibilité de juger les criminels en Afrique. ») En faisant condamner Hissène Habré, Me MOUDEINA a permis de réduire un peu le décalage qui existe entre les principes du droit international et la situations concrète des victimes de violations des droits de l’homme.
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Saint-Martin-d'Hères - Domaine universitaire
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